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Liban - Justice

Sept députés adoptent deux projets de loi en faveur des prisonniers « oubliés »

Les documents se penchent sur la situation des malades mentaux détenus pour avoir commis des crimes et sur la remise en liberté des prisonniers condamnés à perpétuité ou à la peine capitale.

De gauche à droite : Zeina Daccache, Ghassan Moukheiber, Élie Aoun, Michel Moussa et Hamza Charafeddine.

Sept députés, Michel Moussa, Ghassan Moukheiber, Élie Aoun, Élie Keyrouz, Nawwar Sahili, Hani Kobeissi et Atef Majdalani, ont adopté deux projets de loi, préparés par Catharsis, une association à but non lucratif spécialisée dans la dramathérapie (thérapie par le théâtre) au Liban et au Moyen-Orient, qui œuvre notamment au sein des prisons, s'engageant ainsi à les présenter au Parlement dès la relance de l'activité du législatif. Le premier projet de loi propose l'amendement de certains articles du code pénal relatifs aux malades mentaux ou psychiques ayant commis des crimes, et l'autre concerne la problématique relative à la remise en liberté des prisonniers condamnés à perpétuité ou à la peine capitale.

Une conférence de presse s'est tenue à cet effet au siège du Parlement, place de l'Étoile, en présence de Michel Moussa, d'Élie Aoun, de Ghassan Moukheiber, du magistrat Hamza Charafeddine, désigné par le ministère de la Justice pour élaborer les projets de loi, et de Zeina Daccache, directrice exécutive de Catharsis. Ces deux projets de loi s'inscrivent dans le cadre de « L'histoire des oubliés derrière les barreaux », un projet plus global financé par l'Union européenne et réalisé avec les ministères de l'Intérieur et de la Justice. Il a pour objectif d'améliorer la situation de deux catégories de prisonniers « oubliés », qui, en vue des règlements en vigueur, ne peuvent pas retrouver la liberté, à savoir les malades mentaux ayant commis des crimes et les prisonniers condamnés à perpétuité ou à la peine capitale.

 

Le cas des malades mentaux
Tout a commencé en 2012 lors d'une session de dramathérapie à la prison de Baabda, lorsque, pour la première fois alors que les sessions duraient depuis plusieurs semaines, une détenue vient rejoindre ses compagnes. « Cette femme ne sortait presque jamais de sa cellule, explique Zeina Daccache. Elle était pâle et c'est à peine si elle pouvait participer aux exercices. Lorsque je lui ai demandé le nombre d'années auxquelles elle était condamnée, elle a répondu que le jugement émis à son encontre n'était pas clair, mais qu'elle pensait être condamnée à perpétuité. » Zeina Daccache s'est donc informée de la situation juridique de la femme. Elle a découvert que, conformément au jugement émis à son encontre, « elle devait être gardée dans une unité psychiatrique, jusqu'à ce qu'elle guérisse ».

Poussée par la curiosité, la jeune femme a entamé une série de recherches « pour savoir quelles sont les lois appliquées à cette catégorie de prisonniers ». Elle a ainsi découvert que le code pénal, qui date de 1943, qualifie dans les articles 231, 232 et 234 ces malades mentaux de « fous », de « déments » ou de « possédés », ce qui « n'est pas acceptable en 2016 ! » Conformément à ces articles également, « ces personnes doivent être mises dans une unité psychiatrique jusqu'à ce qu'elles guérissent », poursuit-elle. « Or, en psychiatrie, la guérison n'est pas possible, insiste Zeina Daccache. L'état du patient peut devenir stable, mais celui-ci ne peut jamais guérir. » De plus, ces prisonniers étaient souvent gardés avec les autres prisonniers « sains ».

Le premier projet de loi propose donc de remplacer les mots « fous », « déments » et « possédés » du code pénal par « malades mentaux et psychiatriques », d'en rayer le mot « guérison » et de le remplacer par « stabilisation de l'état » du prisonnier. Le texte propose également de charger les psychiatres désignés par le ministère de la Justice de suivre ces prisonniers et d'émettre les rapports les concernant. De plus, « on a proposé que la commission chargée de la réduction des peines décide de leur état mental et par conséquent de leur remise en liberté », sachant que, dans la mouture actuelle du texte de loi, ces prérogatives relèvent du tribunal qui a émis le jugement. Enfin, il a été proposé de transférer cette catégorie de prisonniers dans des hôpitaux psychiatriques ou dans des unités psychiatriques, sachant que seule la prison de Roumieh est dotée d'une telle unité, connue sous le nom de bâtiment bleu.

 

Les condamnés à perpétuité
Le deuxième projet de loi concerne les prisonniers condamnés à perpétuité ou à la peine capitale, qui, « conformément aux règlements en vigueur, ne peuvent pas retrouver la liberté », bien qu'il existe une loi (463, promulguée en 2002) qui leur permet de bénéficier d'une réduction de peine et par conséquent d'une remise en liberté, s'ils font preuve de bonne conduite. Mais ils ne peuvent pas en bénéficier, « en raison des conditions rédhibitoires » qu'elle prévoit, souligne le juge Charafeddine.

En effet, conformément à cette loi, les prisonniers condamnés à perpétuité ou à la peine capitale ne peuvent bénéficier d'une réduction des peines que s'ils versent des indemnités à la famille de la victime, ou si celle-ci abandonne les poursuites qu'elle a engagées contre le criminel... « Le problème, c'est que dans les sociétés orientales et au Liban, où la mentalité tribale prévaut toujours, les familles n'abandonnent pas les poursuites, explique le magistrat Charafeddine. De plus, les prisonniers n'ont pas la possibilité de travailler au sein des institutions carcérales pour pouvoir gagner de l'argent et payer les indemnités aux familles. Par ailleurs, les prisonniers qui ont été jugés entre 1994 et 2001 sont lésés, d'autant qu'ils ont été condamnés à la peine capitale. Nous essayons de trouver une solution juste à leur situation. Idem pour les prisonniers âgés de plus de 75 ans et ceux souffrant de maladies chroniques. »

 

 

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