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Nos Lecteurs ont la Parole - Emmanuel RAMIA

Identité verticale vs identité horizontale

L'identité n'est pas figée. L'identité se forme, se façonne. En revanche, elle provient d'un socle initial qui, lui, est bel et bien figé. Tout individu descend de parents ayant des vécus et des traditions à perpétuer. Celles-ci sont automatiquement transmises à la naissance. Ainsi, d'un point de vue physiologique, les origines ethniques de l'ascendance sont visibles et, d'un point de vue psychologique, voire même philosophique, tout un ensemble de croyances, de traits de personnalités, de mythes, causes et traditions, sont transmises. Tout cela pourrait être appelé l'identité verticale d'un individu. Celle qu'en aucun cas il n'aura choisie, mais qu'il devra s'efforcer tout de même, de par la pression sociale, à faire vivre et à transmettre à ses descendants, toute sa vie durant. Puisque, sans cela, il serait responsable de l'arrêt d'une histoire familiale, clanique, ou de celle d'un peuple. Ce poids-là serait trop lourd à porter. Ceux qui s'y sont aventurés se sont vu très souvent renier le droit de retour par les leurs. Sur la scène politique, la gauche ultraradicale, représentée un moment par le communisme, fit de cette révolte anti-identité verticale sa principale caractéristique, son fer de lance. Certains philosophes aussi, aidés par l'air du temps, propagèrent l'idée que l'homme devait tout à ses choix, puisque « l'existence précède l'essence ».
Mais ce modèle politique et, avec lui, ses philosophes échouèrent à propager au-delà du XXe siècle leur révolte et leurs pensées. Les identités verticales ne furent en aucun cas effacées, pas même au cœur soviétique de l'idéologie. Au contraire, aujourd'hui nous assistons à l'exacerbation de ces particularismes diverses. Nous vivons en somme la revanche de ces identités verticales sur un siècle d'oppression, grâce à une montée en puissance partout d'une politique identitaire décomplexée et assumée : la Russie de Poutine, la Turquie d'Erdogan, les États-Unis de Trump, la France de Le Pen, l'Angleterre de Johnson, Israël de Netanyahu, la Palestine du Hamas... et la liste ne s'arrête pas là. Ces mouvements, que nous autres élites appelons avec mépris « populistes », jouent sur un terrain abandonné par les hommes politiques depuis des décennies, celui de la dimension humaniste transcendante d'un peuple.
En clair, ce que nous reprochons aux politiques c'est d'avoir abandonné le peuple à sa misère matérielle et intellectuelle. Cette misère-là aurait dû être combattue grâce à une éducation mettant l'accent sur la composante horizontale de l'identité de tout un chacun. En nourrissant l'idée que l'individu, certes né avec un bagage vertical important, est capable, de par son vécu et l'accumulation de la connaissance, de se libérer de sa condition initiale, de sortir de sa prison identitaire, afin de sculpter sa propre identité horizontale, nous aurions formés des individus adultes responsables à même d'affronter les défis obscurantistes des temps modernes. En transcendant l'identité verticale, et non pas en l'écrasant comme a tenté de le faire le communisme, nous formerions des citoyens démocrates et tolérants, sans haine ni rancune, sans révolte ni hargne, capables de vivre dans un monde mondialisé. Mais avant tout cela, c'est-à-dire avant l'éducation, il est nécessaire d'émanciper physiquement les populations. Les émanciper en apportant plus de justice aux classes populaires, en étant plus solidaires, plus charitables, en humanisant le capitalisme en somme. Une fois réalisé, à coups de réformes et nettoyages politiques, ce nouveau monde ferait vivre toutes les sociétés en bonne intelligence les unes avec les autres.
Dans ce monde hypothétique où l'identité horizontale aura pris le dessus sur l'identité verticale, la question actuelle qui déchaîne toutes les passions, qui est celle de l'intégration de communautés venues d'ailleurs à une société préétablie, n'aura plus de sens (ex : les musulmans d'Europe, les latinos des États-Unis). En effet, l'atténuation des identités verticales grâce à un monde plus juste ferait disparaître les différences innées, créant seulement des séparations dues au mérite. La différenciation sociale sur des critères horizontaux d'appartenance n'est en aucun cas un facteur de discorde, puisque la notion même de l'autre en tant que groupe disparaît. La distinction au sens du sociologue Pierre Bourdieu est saine. La lutte pour un monde plus juste est le seul espoir pour atteindre l'ataraxie du monde.

L'identité n'est pas figée. L'identité se forme, se façonne. En revanche, elle provient d'un socle initial qui, lui, est bel et bien figé. Tout individu descend de parents ayant des vécus et des traditions à perpétuer. Celles-ci sont automatiquement transmises à la naissance. Ainsi, d'un point de vue physiologique, les origines ethniques de l'ascendance sont visibles et, d'un point de...

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