« Booabbood » ou la tradition ressuscitée...

Ressusciter l'ancestrale lanterne sous la forme d'un kandeel stylisé en cioran, verre et bois de hêtre ; recréer, en perforation sur bois blanc, la chaise cannée (des bistrots européens) et des anciennes cuisines libanaises et la rebaptiser Mcancannée ; réinterpréter l'éternelle et universelle toupie en six déclinaisons de silhouettes colorées de danseurs traditionnels (mexicain, russe, turc...) ; habiller la lumière d'un lampadaire d'une corolle en bois africain évocatrice d'une jupe tournoyante de derviche ou encore s'inspirer de la façade du musée Sursock pour concevoir une ligne-puzzle de produits pour la table – sous-plats, sous-assiettes et sous-verres – en hommage à sa magnifique architecture...

Si le duo de designers de Booabbood utilise souvent les matériaux traditionnels de l'artisanat libanais, à l'instar du bois, du marbre, du cuivre ou du laiton, Joe Bou Abboud et sa femme, Amanda Aoun, s'attachent aussi et surtout à « ressusciter » dans les produits qu'ils conçoivent « ces objets, ces détails ou encore ces scénarios d'usages qui forment l'identité libanaise ».

Ces deux-là se sont rencontrés sur les bancs de l'université. Diplômés en 2009 de l'Alba en architecture d'intérieur et design de produit, ils ont entamé leur carrière ensemble par des collaborations avec Squad, la plateforme de design libanais qui édite et s'occupe de promouvoir les créations des jeunes talents. C'est sur une thématique proposée par Squad, pour réinventer un jouet un peu oublié, qu'ils avaient signé la série de toupies en bois coloré, dans une démarche à mi-chemin entre le bibelot divertissant/déstressant pour les adultes et le joujou pour les enfants.

Avec comme leitmotiv créatif la mise en valeur des traditions artisanales et socioculturelles locales, voire même régionales, au moyen d'un design qui allie harmonieusement l'esthétique et la fonctionnalité contemporaines à l'émotion d'un objet à fort impact identitaire, le tandem de Booabbood crée des produits qui se démarquent. Et se remarquent aussi bien aux Design Days Dubai en 2014 et 2016 qu'au Salone del mobile de Milan en 2015. À l'instar de leur fameuse Mcancannée ou encore des très épurés Kandeels. En 2013, le jeune couple s'installe à son compte. Et lance son propre studio d'architecture d'intérieur et d'architecture de produit tout simplement baptisé Booabbood. Un label à la typographie en elle-même déclaration d'intention, celle d'une revendication identitaire clairement esthétisante et moderne. Mais outre le fait de revisiter la culture, l'artisanat, le patrimoine et jusqu'au mode de vie spécifiquement libanais, dans des créations mobilières, l'ambition de ce duo est aussi de s'attaquer « à des problématiques de fond. À l'instar de la situation des réfugiés syriens au Liban, en participant à trouver des solutions au travers du design, notamment ».

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