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Nos Lecteurs ont la Parole - Ralph NEHMÉ

Les inégalités sociales, pain bénit des mouvances populistes

En ces temps aussi troubles qu'empreints d'incertitude, il est impensable d'occulter les aspects essentiels d'une recrudescence du populisme aussi bien en Europe que dans le reste du monde occidental. Historiquement, au-delà des débats sémantiques, le populisme attribuait aux « élites » la responsabilité de tous les maux de la société, opposant les intérêts du peuple et ceux de la caste gouvernante. C'est aujourd'hui le fil directeur des discours politiques de l'ensemble de ces jeunes mouvements populistes européens – créés pour certains au milieu des ruines de la crise économique – qui se renforcent dans l'état actuel de marasme, menaçant par ricochet les valeurs de méritocratie et de justice sociale : Podemos en Espagne, Syriza en Grèce, le Front national en France, la Ligue du nord en Italie – pour n'en citer que quelques-uns – sont autant de courants politiques qui jouent sans relâche sur les peurs et remettent en doute la capacité du système politique à se renouveler. La popularité de ces partis est incontestablement le meilleur baromètre de l'état de déliquescence du contexte économico-politique de l'Europe aujourd'hui.
Biberonnée aux mesures d'assouplissement quantitatif (Quantitative Easing), l'économie européenne peine à se relever faute de compromis et de politique commune sur les plans monétaire et fiscale. Bien qu'empruntant à des taux négatifs (pour la plupart), les États-membres se sont engagés dans des politiques d'austérité qui prennent le pas sur les mesures de relance keynésienne, censés relancer la croissance à travers davantage de dépenses publiques et d'investissements. Par conséquent, les arguments extrémistes qui jadis séduisaient l'électorat réactionnaire gagnent à présent une grande partie de la jeunesse, laissée pour compte et massivement séduite par une alternative aux partis traditionnels. Ces derniers sont vastement contestés pour leur manque de courage et d'audace, car cadenassés à leur vision binaire et dogmatique des politiques économiques. À titre d'exemple, 30 % des jeunes sans expérience professionnelle ont du mal à trouver un premier emploi en France. Le taux de chômage pour cette catégorie de la population atteint la barre de 50 % environ en Grèce et en Espagne.
Force est de constater que l'enracinement des partis populistes est lié à une multitude de facteurs, notamment – comme cité précédemment – à l'accroissement des inégalités persistantes dans bien des pays développés et qui renvoient aux conceptions fondamentales de la justice sociale. Ces dernières pouvant se traduire à plusieurs niveaux : inégalités des chances, inégalités de consommations, inégalités de richesses... De manière générale, les inégalités s'accroissent, car la part du revenu allant au travail s'est réduite alors que celle allant au capital s'est accrue.
Deuxième facteur, la crise identitaire que traverse l'Occident et plus précisément l'Europe est une caisse de résonance pour les partis qui prétendent incarner un discours de vérité et décomplexé. Designer l'autre comme unique source de malheurs – sans reconnaître sa contribution tant au niveau économique que culturel – fut l'un des artifices utilisés dans les années 30. C'est ainsi que justifient le FPO autrichien, le Front national français ou encore l'UDC suisse l'ensemble des mesures protectionnistes et isolationnistes qu'ils défendent ardemment.
Pour finir, la défiance envers la classe politique – critiquée pour sa proximité avec le milieu des affaires et les réseaux d'influence – est un argument supplémentaire repris dans les diatribes populistes. À ce titre, le candidat Trump use et abuse de cette carte durant sa campagne à l'élection présidentielle américaine, se désignant comme un « outsider » du système politique, prêt à en découdre avec les nantis et les ploutocrates. Quand bien même investi par le Parti républicain, il jouit de son statut de candidat hors système capable de transgresser le « politiquement correct ».
Comment ne pas être tenté par une voie alternative, plus isolationniste et sectaire, quand les partis traditionnels échouent à réduire l'écart des inégalités aussi bien qu'à endiguer l'afflux incontrôlé de migrants et redynamiser le marché du travail ? Quelle crédibilité les partis traditionnels tirent-ils en puisant certains slogans nauséabonds des partis extrémistes en périodes électorales, courant derrière un électorat obsédé à l'idée de renverser la table et défaire l'alternance des courants droite et gauche ? À moins de combattre les inégalités sur un plan national en priorité, le vote massif en faveur des courants populistes ne cessera de croître, mettant en péril l'harmonie des peuples et les grandes réalisations de la mondialisation des dernières décennies.

En ces temps aussi troubles qu'empreints d'incertitude, il est impensable d'occulter les aspects essentiels d'une recrudescence du populisme aussi bien en Europe que dans le reste du monde occidental. Historiquement, au-delà des débats sémantiques, le populisme attribuait aux « élites » la responsabilité de tous les maux de la société, opposant les intérêts du peuple et ceux de la...

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