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Moyen Orient et Monde - Le point

Les sept plaies

À la première session du Parlement égyptien issu d’élections marathoniennes qui se sont terminées le 11 janvier, le doyen d’âge Mahmoud el-Saqqa a invité ses collègues à réciter, avant de prêter serment, la fatiha « à la mémoire des martyrs de la révolution du 25 janvier dont le sang nous a conduits à ce jour ». Sans doute est-ce dans l’évident souci de faire bonne mesure que le même homme a enjoint à l’avocat fondamentaliste Mamdouh Ismaïl de s’en tenir au texte et de ne pas y inclure, ainsi qu’il venait de le faire, l’engagement à « respecter la loi de Dieu ». Voilà qui est clair et qui devrait, pour l’instant et dans une certaine mesure, rassurer ceux qui, depuis quelque temps, expriment la crainte de voir le pays basculer dans l’extrémisme comme le laisserait accroire la configuration de l’Assemblée nationale, avec 47 pour cent de sièges échus au parti de la Liberté et de la Justice (Frères musulmans) et 24 pour cent aux radicaux d’al-Nour.
S’ouvre maintenant une ère placée sous le signe de l’incertitude, qu’il s’agisse de l’impact de la victoire des Ikhwane et de leurs rapports avec les salafistes, de la répartition des tâches avec les membres du Conseil suprême des forces armées (CSFA), des orientations à prendre à l’échelle nationale, régionale et internationale, enfin de la solution à apporter au grand problème qui se pose, d’ordre financier celui-là.
Il y a ceux qui voient dans les résultats de la consultation populaire les signes annonciateurs d’une alliance entre les deux grands pôles islamistes et ceux qui, au contraire, y trouvent les sources d’un conflit appelé à prendre tôt ou tard un caractère aigu, sinon violent. La différence entre les deux camps est de taille ; elle ne réside pas, contrairement à ce que pensent certains observateurs occidentaux, dans une certaine vision du pouvoir, mais dans la maturité des disciples de Hassan el-Banna, à laquelle s’oppose l’amateurisme prêté aux partisans du Dr Akef el-Moghrabi. Il est souvent arrivé aux premiers, surtout lors de la seconde « intifada », celle, récente, des jeunes, de la place al-Tahrir, de composer avec les militaires, en refusant de s’engager avec eux dans une confrontation, en renonçant à réclamer une démocratisation complète du système, en acceptant le candidat des officiers à la présidence du Conseil, Kamal al-Ganzouri. Certains croient même savoir que les contacts sont en cours pour le choix du prochain chef de l’État. Leurs adversaires au sein de la même mouvance n’ont pas su, ou voulu, faire preuve d’habileté, préférant jouer sur l’attrait du dogmatisme à l’heure où celui-ci paraît avoir le vent en poupe dans le monde arabe.
Souplesse d’un côté, rigidité de l’autre, à quoi il conviendrait d’ajouter que les salafistes ont adopté à l’égard de la minorité chrétienne une attitude de franche hostilité, allant, par exemple, jusqu’à qualifier d’impies les célébrations de Noël quand les représentants des Frères musulmans se faisaient un point d’honneur d’assister à la messe ce jour-là.
En 1962 paraissait à Paris un livre qui eut un énorme retentissement*. Œuvre d’Anouar Abdel Malek, un sociologue marxiste, Égypte, société militaire dresse un bilan exhaustif des dix années qui ont suivi la révolution de 1952. L’auteur analyse les deux problèmes fondamentaux qui sont la conquête de l’indépendance et le développement de l’économie, et expose les raisons qui font des dirigeants militaires une caste à part, distincte de la petite bourgeoisie dont elle est pourtant issue. Depuis, cette société est demeurée, mutatis mutandis, la même, à cela près qu’il lui est pratiquement impossible aujourd’hui d’embastiller à tour de bras, comme sous les trois régimes précédents, ceux qui prétendraient l’empêcher de se maintenir au pouvoir.
L’autre grand problème de l’Égypte post-Moubarak est représenté par la conjoncture économique. Les derniers chiffres inquiéteraient le plus optimiste des Pangloss. Au rythme actuel de l’hémorragie dont est victime le pays, les caisses seraient vides en mars de cette année, les réserves en devises étrangères ne représentant plus qu’une dizaine de milliards de dollars contre 36 milliards par le passé. L’État doit emprunter à des taux record, ce qui impose à brève échéance des coupes drastiques dans les dépenses publiques (de l’ordre de 20 milliards de livres égyptiennes, soit 4,3 milliards de dollars) et la levée des subventions. Il devra en outre admettre de passer sous les fourches caudines du Fonds monétaire international s’il veut obtenir un prêt de 3,2 milliards de dollars, après avoir précédemment rejeté les conditions posées par l’organisation.
Une décision du FMI, dans un sens ou un autre, n’est pas attendue avant le mois de mars ; les 35 milliards promis à l’Égypte et à la Tunisie par le Groupe des 8 se font toujours attendre ; enfin des 7 milliards des États du Golfe, la Banque centrale n’en a reçu qu’un seul. Décidément, l’économie locale, appelée à devenir la dixième du monde, promet-on, est riche en promesses non tenues.

*Égypte, société militaire, par Anouar Abdel Malek, 384 pages, éd. du Seuil.
À la première session du Parlement égyptien issu d’élections marathoniennes qui se sont terminées le 11 janvier, le doyen d’âge Mahmoud el-Saqqa a invité ses collègues à réciter, avant de prêter serment, la fatiha « à la mémoire des martyrs de la révolution du 25 janvier dont le sang nous a conduits à ce jour ». Sans doute est-ce dans l’évident souci de faire bonne...

commentaires (1)

Tout tournera autour du nerf de la guerre , et c'est valable dans toutes ces revoltes arabes, les recup ne se feront que par ce canal. Les occidemtaux ayant leurs sbires a travers les financements bensaoud, et les autres qui iront se financer lla ou ca peut mordre. Mais au final, la mere des batailles sera le probleme palestinien, qu'on le veuille ou non, il est le catalyseur des souffrances annoncees et a venir, c'est peut etre une illusion ou un reve , mais les faits rien que les faits parleront.

Jaber Kamel

05 h 53, le 24 janvier 2012

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Commentaires (1)

  • Tout tournera autour du nerf de la guerre , et c'est valable dans toutes ces revoltes arabes, les recup ne se feront que par ce canal. Les occidemtaux ayant leurs sbires a travers les financements bensaoud, et les autres qui iront se financer lla ou ca peut mordre. Mais au final, la mere des batailles sera le probleme palestinien, qu'on le veuille ou non, il est le catalyseur des souffrances annoncees et a venir, c'est peut etre une illusion ou un reve , mais les faits rien que les faits parleront.

    Jaber Kamel

    05 h 53, le 24 janvier 2012

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