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Liban - Les électeurs libanais ont la parole - Législatives 2013

« Les députés actuels n’ont rien amélioré dans notre vie », estiment les Patanian du Metn

Sixième volet de notre série* en partenariat avec la Fondation Samir Kassir sur les attentes des électeurs libanais : la famille Patanian, du Metn.

Aline et Vicken Patanian.

Entre Bsalim et Antélias, se trouve une route bien connue des habitants de la région. Un peu en retrait, elle relie les deux collines. Il y a quelques années encore, cette vallée était totalement inhabitée, et les routes la traversant étaient infestées de trous assez grands pour assurer de belles journées de travail aux garagistes du coin.
Récemment, d’élégants immeubles ont poussé dans la vallée, qui abritent des familles de classe moyenne à aisée, intéressées par la relative proximité de la capitale. L’infrastructure est toujours aussi mauvaise, mais la région nettement plus animée.


C’est dans l’un de ces appartements neufs, décoré avec soin, qu’habitent Vicken Patanian, 42 ans, avocat, et son épouse Aline Capucci, 45 ans, comptable, tous deux propriétaires de leurs bureaux respectifs.
« Le communautarisme existe partout, au Canada, en Belgique, en Suisse..., déclare d’emblée Vicken Patanian, qui n’a pas besoin d’invitation pour parler politique. Pourquoi ne pas le réglementer et le canaliser comme les Suisses l’ont fait ? Il faut créer des systèmes équitables et logiques pour mieux gérer le communautarisme politique au lieu de prétendre qu’il n’existe pas. Ne nous leurrons pas. Surtout que notre problème dépasse le communautarisme : nous en sommes au sectarisme politique. »


Pour l’avocat, le problème libanais réside surtout dans l’absence d’un système de légifération clair, notamment au niveau des lois électorales qui se sont succédé. « Peut-on dire que ces lois permettent une bonne représentativité ? demande-t-il. Je suis arménien-orthodoxe, ce n’est pas moi qui choisis les députés de Beyrouth de ma communauté, mais l’électorat sunnite. De même pour le député maronite de Baalbeck, élu par des voix majoritairement chiites. Je ne dis pas que le député doit représenter sa seule communauté, mais il faut que tous les électeurs se sentent concernés et aptes à choisir les députés qu’ils veulent, même si ces députés vont devenir les représentants de la nation, ce qui est très normal. »


Interrogé sur le projet de loi dit orthodoxe, qu’ont voté les sous-commissions parlementaires le 19 février dernier, Vicken Patanian déclare ne pas avoir bien compris le texte, bien qu’il soit, lui-même, un homme de loi. « Je n’ai pas bien compris ce texte parce que, à mon avis, ceux qui l’ont élaboré ne le comprennent pas non plus, estime-t-il. De plus, je ne conçois pas que des lois soient élaborées sans une base claire. En fait, il faut jeter les bases du système politique que nous voulons avant d’élaborer une quelconque loi, car celle-ci est supposée réglementer la vie politique, pas servir les intérêts des uns et des autres. »

 



« Nous n’éduquons pas nos enfants à l’amour de la patrie »
 Au-delà des considérations sur la loi électorale, Aline et Vicken Patanian sont un jeune couple comme tant d’autres au Liban. Mais s’ils partagent les mêmes difficultés de la vie quotidienne, les Patanian s’estiment privilégiés par rapport à d’autres.


L’aînée de leurs enfants, Yara, 18 ans, a entamé des études au Canada, alors que les deux plus jeunes, Marc, 12 ans, et Alex, 10 ans, sont scolarisés dans une école privée. Leur appartement est une propriété conjointe, « mais avec la flambée des prix, nous ne savons pas s’il nous aurait été possible de l’acheter aujourd’hui », reconnaissent les Patanian.
« Notre premier souci, c’est d’assurer la scolarité des enfants, leur permettre d’étudier dans de bonnes universités et d’envisager un avenir brillant, explique Aline. Notre second souci est de régler nos traites car nous payons tout à crédit : la maison, la voiture... »


Ce qui gâche la vie des Patanian gâche celle de tant d’autres Libanais : les doubles factures (d’eau et d’électricité), l’infrastructure défaillante, le trafic inextricable qui leur fait passer des heures sur la route du travail, chaque jour, l’absence de protection du consommateur (eau, denrées alimentaires...).
Avec une fille déjà à l’étranger, le couple reconnaît aussi que la perspective d’une émigration de leurs autres enfants les inquiète. « Il y a un problème d’éducation à la base, nous n’inculquons pas aux enfants l’amour de la patrie, c’est comme si nous les préparions au voyage », déplore Aline.
Ces défaillances, les Patanian en font assumer la responsabilité aux autorités politiques, fustigeant, au passage, la volonté d’augmenter le nombre de députés.


« Les députés actuels n’ont rien amélioré dans notre vie, affirme Aline. Des projets de lois attendent dans les tiroirs depuis des années. Pourquoi élire plus de députés si ceux-ci sont si frileux qu’ils n’osent pas signer des projets de loi selon leur conviction, parce qu’ils en craignent les conséquences potentielles pour eux ? Qui ose aujourd’hui signer le projet de loi sur le mariage civil et d’autres textes sur lesquels tout le monde est d’accord mais qui ne sont pas approuvés ? » Les Patanian ont contracté un mariage civil par conviction.

Confier les grands projets à des institutions locales
 Quel serait, par conséquent, pour eux, le candidat idéal ? Pour Vicken et Aline Patanian, le candidat idéal ne se trouve pas parmi ceux qui se présentent aujourd’hui. « Il existe certainement des personnes compétentes et intègres, mais elles ne peuvent rien faire tant que le système reste inchangé », estime la jeune femme.
Comment le système peut-il changer si celui-ci convient à la classe politique actuelle ? « Il faut faire un choix essentiel, voulons-nous un État ou non ? répond Vicken. Pour moi, le candidat idéal devrait être capable de moderniser la Constitution de façon à ce qu’elle soit logique et homogène, et d’élaborer une loi électorale qui en soit le prolongement. Le député que nous voulons, c’est celui qui aurait une vision pour un État libanais polychrome. »


Il poursuit : « Voilà pourquoi je suis avec la consécration du principe du communautarisme politique et de la décentralisation administrative, qui devra nous mener à repenser la structure des actuels cazas, mohafazats et circonscriptions électorales. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons établir un système clair. À titre d’exemple, si nous confions de grands dossiers comme l’électricité à des institutions locales, la collecte sera plus efficace et le déficit moindre. Ce sont les fils de la région qui seront embauchés en priorité. Qu’on le veuille ou pas, notre appartenance va à la communauté, et nous réalisons volontiers tout ce qui lui fait du bien. Alors, consacrons ce principe et allons de l’avant. À ce moment-là, tout marchera comme sur des roulettes, dans un système quasi privatisé, au sein duquel tout le monde trouvera son compte. »


Pour Aline, « il est impératif que les ministères soient réhabilités, qu’on mette un terme aux vols et aux pots-de-vin, et qu’on recrute les bonnes personnes au bon poste ». Mais elle reste sceptique quant à la possibilité de changement de la société libanaise. Autant elle que son mari ne voient d’espoir que dans une modification radicale des mentalités via l’éducation.

 

Retrouvez les rencontres précédentes dans notre dossier spécial "Les électeurs libanais ont la parole"

Entre Bsalim et Antélias, se trouve une route bien connue des habitants de la région. Un peu en retrait, elle relie les deux collines. Il y a quelques années encore, cette vallée était totalement inhabitée, et les routes la traversant étaient infestées de trous assez grands pour assurer de belles journées de travail aux garagistes du coin.Récemment, d’élégants immeubles ont poussé...

commentaires (1)

Ah NON ? Pourtant ils ont super amélioré leurs POCHES. Ne sont-elles pas du METN aussi ?

SAKR LEBNAN

07 h 58, le 14 mars 2013

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Commentaires (1)

  • Ah NON ? Pourtant ils ont super amélioré leurs POCHES. Ne sont-elles pas du METN aussi ?

    SAKR LEBNAN

    07 h 58, le 14 mars 2013

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