On cherche à gagner du temps...

À présent que la proposition du Rassemblement orthodoxe a été approuvée en commissions parlementaires, la question qui se pose est de savoir si le processus d’adoption de ce projet ira jusqu’au bout, en dépit de l’attitude manifestée à son égard par le courant du Futur, le PSP et les chrétiens indépendants, ou bien si l’on s’oriente vers une impasse puis une solution de compromis.

Si un fait est sûr, c’est qu’en laissant la Chambre procéder au vote de l’article 2 de la proposition « orthodoxe » malgré la sortie des députés sunnites et druzes et d’une partie non négligeable des chrétiens, le président de la Chambre, Nabih Berry, n’a voulu tenir compte que du quorum strictement formel, qui était toujours disponible, sans s’embarrasser de considérations ayant trait à la conformité au Pacte national.

Dans les milieux de l’opposition, on se demande si, en faisant cela, M. Berry n’a pas cherché à lancer un défi à l’adresse du président de la République, dont l’hostilité à l’égard de la proposition du Rassemblement orthodoxe est bien connue.

Comment le chef du législatif feint-il d’ignorer la position du chef de l’État et la menace de ce dernier d’attaquer la loi « orthodoxe » devant le Conseil constitutionnel ? Pourquoi a-t-il persisté dans le processus de vote sachant qu’il y avait un problème sur le plan du respect du Pacte et que lui-même est généralement attaché à cet aspect ? s’interroge un député du 14 Mars.

Pour un analyste politique, ce qui s’est passé à la Chambre hier entre dans le cadre de tentatives menées pour gagner du temps en attendant les circonstances propices à des concessions de part et d’autre, la phase actuelle étant plutôt une phase d’immobilisme pendant laquelle chaque partie cherche à s’accrocher à ses positions. Et il est évident que ce sont les développements régionaux, et tout particulièrement en Syrie, qui détermineront le passage d’une phase à l’autre.

Pour sa part, un député du bloc du Futur pense que ce qui s’est passé hier n’est nullement un défi, mais une tentative de la part de Nabih Berry d’améliorer ses positions négociatoires en vue d’un compromis à partir du projet « orthodoxe ». Ainsi, M. Berry escompte obtenir davantage pour son camp à partir d’une position de force.

D’ailleurs, un membre des commissions conjointes affirme qu’au début du vote hier sur l’article 2 de la proposition « orthodoxe » et alors que les députés du Futur et du PSP et les chrétiens indépendants avaient quitté la salle, M. Berry a demandé au ministre de l’Intérieur, Marwan Charbel, de passer le voir avant la fin de la semaine pour concocter ensemble un compromis acceptable pour tout le monde.

Beaucoup de députés croient en effet que le président de la Chambre n’ira plus de l’avant dans l’élargissement du fossé et qu’il finira par se poser en sauveur du Pacte.

Quant au ministre de l’Intérieur lui-même, il reste convaincu que certaines parties ne veulent pas du déroulement des élections et que la querelle sur la loi électorale n’est qu’un prétexte pour parvenir à un ajournement du scrutin.
Quoi qu’il en soit, un ancien ministre qui avait pris part aux réunions de Taëf souligne que le projet « orthodoxe » est en violation avec l’esprit et le texte de l’accord de Taëf et est nuisible à la formule de coexistence entre les Libanais et à la paix civile.

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