S’il assure avec brio ses fonctions de représentation, cet ambassadeur-là n’en cultive pas moins d’ « Autres regards » que ceux de l’acuité diplomatique portée aux événements. À commencer par celui d’un homme sensible à la détresse humaine, doublé d’un certain sens artistique. Un regard qui sait capter, dans son viseur de photographe amateur, avec un sens inné de la composition, toute la force de témoignage d’une situation donnée.
Ainsi, parmi les 170 clichés de format moyen (30 x 45cm), tirés de ses archives personnelles, qu’il expose pour la toute première fois au public à la villa Audi (sous l’intitulé « Otras miradas » ou « Autres regards » ), une bonne majorité « raconte » le quotidien des gens. Du coiffeur soudanais dans son échoppe aux gamins pauvres de Port-au-Prince à Haïti, en passant par les marchés colorés d’Afrique, d’Amérique du Sud ou d’Asie, les bidonvilles de Calcutta ou de Kibera au Kenya – « le plus grand au monde avec 70 % d’habitants infectés du virus du sida », signale-t-il –, c’est l’empathie d’un homme touché par l’humain et préoccupé par la dureté des conditions de vie de nombreuses populations à travers le monde qui se dégage de bon nombre de ses photos.
Sauf que la plus absolue misère garde dans ses clichés un impact artistique obtenu au moyen d’une harmonieuse combinaison du bon cadrage et des couleurs. Certes, l’exposition présente aussi d’autres photos de paysages paradisiaques de tous les continents, d’architectures typiques, de déserts ou d’animaux sauvages, mais elle reste dominée par la représentation de l’humain. Des portraits pris sur le vif, avec une caméra argentique, au hasard d’un « regard touchant et émouvant », indique Juan Carlos Gafo, qui semble particulièrement sensible aux appels muets des yeux graves des enfants.
Le photographe et président de la Maison libanaise de la photographie, Bassam Lahoud, qui s’est occupé de l’agrandissement des photos et de leur encadrement, ne cache pas son enthousiasme. « Pour un coup d’essai, c’est un coup de maître, affirme-t-il. Monsieur l’ambassadeur a un certain regard, c’est sûr. Mais, surtout, il sait instinctivement capter et retranscrire le regard des autres. » Mais n’est-ce pas là la véritable vocation du diplomate ?
Toujours est-il qu’en fidèle serviteur de son pays, Juan Carlos Gafo reversera la totalité des bénéfices engendrés par son exposition à des œuvres caritatives espagnoles !
*Avenue Charles Malek, près Centre Sofil. Horaires d’ouverture de 10h à 18h. Tél. 01/331600.