Chaque animal, qu’il s’agisse d’un sanglier, d’un renard, d’un cerf, d’un lapin ou d’un oiseau, produit un son différent dans la forêt, s’émerveille cette jeune femme de 31 ans. Quand elle aperçoit une cible potentielle, elle lève son fusil, vise et retient son souffle. « J’essaie de ne faire aucun bruit, (de rester) calme et concentrée, et de respirer doucement car je ressens bien sûr beaucoup d’excitation », explique-t-elle.
Ses boucles d’oreille, son piercing au nez, son visage légèrement fardé contrastent avec son arme de 3 kilos et demi, presque aussi grande qu’elle, posée sur l’épaule. « Il y a environ 35 000 femmes qui chassent » en Allemagne, indique Torsten Reinwald, porte-parole de l’association. Si elles n’ont jamais été formellement interdites de pratiquer la chasse, elles étaient il y a encore 40 ans traitées de « Flintenweib » (femme au fusil), rappelle-t-il. Aujourd’hui, les femmes représentent près d’un quart des candidats à l’examen du permis de chasse. Des parties de chasse réservées aux femmes sont même organisées en Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Pour M. Reinwald, leur motivation vient souvent du plaisir de se retrouver dans la nature ou de manger de la viande plus saine.
Dans la forêt près de Nauen à 40 km à l’ouest de Berlin, Johanna Hofmann retire elle-même avec son couteau les entrailles des animaux qu’elle a chassés, avant de les peser, de les faire enregistrer à l’office des forêts et de régler la viande qu’elle emportera chez elle. À Noël, elle a cuisiné un cerf qu’elle avait chassé, ce qui a donné une saveur spéciale au repas. « Beaucoup de personnes qui mangent de la viande de supermarché ne savent pas d’où elle provient alors qu’ils assimilent les chasseurs à des meurtriers. C’est un paradoxe », regrette-t-elle. Après des études en sylviculture, elle a rejoint l’association de chasse comme conseillère. Aujourd’hui, elle part chasser avec son compagnon une fois par semaine, sauf les jours de forte pluie.
Mère de trois enfants, Nathalie Bunke, 46 ans, qui a passé l’examen il y a 10 ans, se souvient des six mois de préparation, y consacrant deux soirées par semaine et tous ses week-ends, alors que ses enfants avaient deux et quatre ans. « C’était très difficile, mais tellement intéressant, y compris le volet biologique (...) J’ai échoué la première fois, mais j’ai réessayé », se rappelle-t-elle. Elle part régulièrement chasser avec son mari qu’elle a converti à sa passion. Ses trois filles aussi ont été initiées à la chasse. Ses yeux s’illuminent lorsqu’elle décrit le frisson que lui procure le vol silencieux d’une chouette. Avec les restes des animaux et notamment leur fourrure, elle fabrique des bijoux et des objets éducatifs qu’elle vend. Elle enseigne par ailleurs la chasse comme bénévole.
Les deux femmes insistent sur le besoin de respecter les animaux qu’elles abattent et sur les différences entre hommes et femmes dans la façon d’aborder ce loisir. Pour Johanna Hofmann, les hommes s’intéressent plus aux trophées et à la connaissance des armes. « Les chasseuses que je connais sont plus prudentes (...) Elles ne sont pas aussi rapides à tirer », constate Nathalie Bunke. « Certaines femmes, si elles décident de devenirs chasseuses, sentent qu’elles doivent être meilleures que leurs collègues masculins, et parfois elles le sont », reconnaît Torsten Reinwald.
(Source : AFP)
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