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Culture - Exposition

Malgorzata Paszko, maîtresse des ombres et des lumières

Elle ne l’a pas volé son surnom de maîtresse des ombres et des lumières, Malgorzata Paszko ! Pour cette exposition à la galerie Alice Mogabgab*, entre teintes nocturnes et paysages gorgés de lumière, son pinceau et sa palette parlent avec romantisme, en tonalités fluides, du bonheur de vivre.

« Le marronier en fleurs ».

Le regard clair comme une eau de source, les cheveux châtains sagement rejetés sur le front, collier en pierre turquoise assorti à ses yeux brillants derrière une paire de lunettes au verre transparent, Malgorzata Paszko, cinquante-sept ans, avec une voix basse proche du murmure, a une douceur feutrée pour s’entretenir des quatorze toiles tapissant l’espace qui leur est alloué.
Des toiles d’un impressionnisme virtuose qui, sous le titre de «Cœur de nuit, clair de jour», portent haut une inspiration «hymne à la nuit», dans une carrière qui a à son actif plus de trente-quatre ans de labeur et de succès.
«Des nocturnes» dit-elle d’emblée, presque avec tendresse, en embrassant d’un regard circulaire ce monde en camaïeu de couleurs aux tonalités sombres et ombrageuses. Tonalités où dominent le bleu, le vert et quelques brèves incursions du babil des jonquilles jaunes, des lavandes cyclamens et des muguets blancs...
Entre villes froides et brumeuses sous les lampions, rues animées, mais présence pressée et furtive et paysages d’une campagne solitaire et à l’abandon sous un rai de lune, les angles s’arrondissent, la végétation tient un discours volubile, les façades des immeubles jettent des ombres inquiétantes, les herbages, heureux de leur liberté, se retiennent de frissonner, les marronniers en fleurs, aux branchages lourds, ont des attitudes de patriarche statique et imposant...
Contour mystérieux comme pour un conte ou un secret qu’on hésite à livrer. La magie de la nuit, la féerie du jour et l’alchimie de la peinture, avec ses pigments et ses liants qui prennent d’insoupçonnables chemins de traverse, jettent un voile dans leur union. Voile impalpable d’une pudeur au tremblé discret, presque friable. Elles creusent aussi en profondeur et aspérités inattendues des bribes de souvenirs qui ressurgissent, rafraîchis, renouvelés, rhabillés, magnifiés, (dé)dramatisés.
Des images où joue le vent, chante la vie, se prélasse une certaine sérénité, habite en une humeur enjouée et frileuse à la fois, l’esprit d’évocations phosphorescentes, proches ou lointaines.
Évocations de sentiments, de sensations, des souvenirs jaillis des moments heureux ou d’éblouissements, des randonnées dans l’espace et le temps. Moments restés captifs, non seulement des prunelles et des paupières mais aussi du cœur et de la mémoire.
Des souvenirs toujours vivaces dans leur tendresse, leur passion, leur exaltation et leur force, comme un renvoi naturel au sol natal d’une Polonaise aujourd’hui installée en France. Et qui en a récolté des louanges et des prix pour un art qui se confond avec sa propre vie.
Le «j’ai toujours peint» (avec un sourire de confession comme pour gommer la notion même du temps, incluant ainsi les premiers émois de l’enfance) qui lui échappe témoigne de son immémoriale union avec le pinceau, la palette et le chevalet. Quoique, pour peindre ses mégatoiles de 190 cm x 270 cm, c’est au travail à partir du parquet – et non du chevalet – que revient tout le mérite de cette fine et vibrante dentelle de couleurs superposées, dont les détails et la richesse sont d’une hallucinante minutie.
En se référant au sol natal pour parler de ces images entre Varsovie, Paris et la Normandie, on évoque bien entendu la musique de Chopin avec ses accords en grappes, ses rubatos et ses chromatismes tourbillonnants et échevelés, parfaitement dans le sillage d’un pinceau éperdument épris d’ombre et de lumière... Renvoi à Chopin, ses ballades, sa mélancolie, ses rêveries, sa poésie, sa fièvre des grandes errances solitaires.
Dans un sens à la fois mesuré et exubérant de l’ordre, du raffinement et de l’énigme, tout cela revit dans les toiles de Malgorzata Paszko. Pour de grandes promenades entre lueur blafarde des cités saisies par la nuit, des taches de verdure aux herbes follement orchestrées dans leurs fouillis colorés et l’inflorescence des chardons sur des terrains arides battus par le vent.
Les toiles à l’acrylique dilué de Malgorzata Paszko se déploient telles des rêveries sinueuses, captant comme une invisible toile d’araignée lumière et ombre. Des rêveries scintillantes comme les phrases au long cou du Pèlerin Polonais qui n’ont pas fini de nous envoûter dès qu’on effleure les touches d’ivoire.

* Galerie Alice Mogabgab (rue Achrafieh, immeuble Karam) jusqu’au 18 mai.
Le regard clair comme une eau de source, les cheveux châtains sagement rejetés sur le front, collier en pierre turquoise assorti à ses yeux brillants derrière une paire de lunettes au verre transparent, Malgorzata Paszko, cinquante-sept ans, avec une voix basse proche du murmure, a une douceur feutrée pour s’entretenir des quatorze toiles tapissant l’espace qui leur est alloué. Des...

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